Une vision de la vie, un voyage d’hier à aujourd’hui
D’un théâtre valentinois en passant par un aéroport, de la Tunisie à la Côte d’Ivoire, du pont du Gard aux rives du Rhône, d’une traversée héroïque et la recette d’une gourmandise, suivez l’auteur dans ses tribulations, tantôt comiques, tantôt graves. Joueur avec les mots mais toujours rêveur et poète, il accorde un regard parfois acide et réaliste sur nos contemporains, mais aussi porteur de courage pour l’avenir.
De page en page, de nouvelle en nouvelle, les textes sans liens – si ce n’est le besoin de crier fort la vie – défilent !


Dany –
Une odyssée intérieure entre ironie douce et lucidité mordante
Dans Tribulations d’un écrivaillon, Hervé Garan livre un texte à la frontière entre autofiction, journal d’humeur et exercice de lucidité grinçante. Dès les premières pages, on comprend que l’auteur ne cherche ni à plaire ni à convaincre : il expose, avec une franchise désarmante, les contours flous d’une vocation d’écrivain sans éclat ni gloire. Le terme même d’« écrivaillon », choisi avec une ironie acide, annonce la couleur : ici, il ne sera pas question de romancer l’acte d’écrire, mais d’en explorer les failles, les frustrations et les mirages avec un humour à la fois caustique et pudique.
Le style d’Hervé Garan est un atout majeur de l’ouvrage. Sobre sans être sec, précis sans lourdeur, il capte les états d’âme de son narrateur avec une efficacité discrète. L’auteur parvient à maintenir un ton d’autodérision élégant sans jamais sombrer dans le cynisme stérile. Il parle de doutes, d’échecs, de l’absurdité des circuits éditoriaux et de la solitude d’un homme qui écrit sans que personne ne lise, ou presque. Mais loin de se plaindre, il observe. Il transforme l’ordinaire en matériau littéraire, et c’est là que réside toute la force du livre.
Il y a dans cette oeuvre une conscience aiguë de la position marginale de celui qui écrit sans reconnaissance ni lectorat étendu. Cette lucidité, parfois douloureuse, évite l’apitoiement grâce à une mise à distance teintée d’humour. Certains passages, empreints d’un comique discret mais percutant, rappellent qu’Hervé Garan sait manier le trait d’esprit autant que la confession sincère. Il ne se met jamais en scène en héros maudit, mais plutôt en témoin lucide d’une passion qui le dépasse autant qu’elle l’obsède.
Ce qui frappe aussi, c’est l’absence de complaisance. L’auteur ne cherche pas d’excuses. Il n’accuse pas l’époque, ni le lectorat, ni les maisons d’édition : il interroge. Sa démarche est réflexive, presque philosophique par instants, lorsqu’il explore le sens de l’écriture en l’absence de résonance extérieure. On y lit une mélancolie discrète, mais aussi une forme de paix, voire de fidélité à soi-même.
En somme, Tribulations d’un écrivaillon est un livre modeste dans sa forme, mais dense par ce qu’il révèle des coulisses de la création littéraire. Il ne crie pas, il ne parade pas ; il expose, avec sincérité et intelligence, le parcours d’un homme pour qui écrire n’est pas un choix mais une nécessité intérieure. Et c’est cette nécessité qui donne au texte toute sa valeur.
Style du livre : 8/10
Le style d’Hervé Garan est fin, nuancé et empreint d’une justesse dans le ton. Il évite l’esbroufe, privilégie la clarté et la sobriété, tout en glissant des pointes d’ironie qui enrichissent le propos. L’écriture fluide permet une lecture agréable, et le choix d’un vocabulaire mesuré montre une grande maîtrise. Ce n’est pas un style flamboyant, mais il sert parfaitement le contenu, ce qui en fait sa force.
Son histoire : 6/10
L’ouvrage ne suit pas une intrigue traditionnelle, ce qui pourra en désarçonner certains. Il s’agit davantage d’un parcours introspectif que d’un récit structuré avec tension ou climax. L’originalité réside dans cette chronique de la modestie littéraire, mais le fil narratif reste volontairement discret, parfois épars. Cela fonctionne pour le propos, mais peut limiter l’attachement à l’ensemble pour un lecteur en quête de récit fort.
Son suspense ou sa façon de retenir le lecteur : 7/10
L’auteur ne joue pas la carte du suspense classique. Ce qui retient ici, c’est la voix, le ton personnel et la lucidité désarmante. L’intérêt repose sur la manière dont chaque réflexion est amenée, et sur la sincérité du regard porté sur l’écriture elle-même. Il ne s’agit pas d’un page-turner, mais l’honnêteté de l’approche captive d’une autre manière, plus subtile.
La fin du livre : 7/10
La conclusion n’est ni spectaculaire ni attendue. Elle s’inscrit dans la continuité du propos : simple, cohérente, sans artifices. Il n’y a pas de chute frappante, mais une forme d’acceptation apaisée, ce qui correspond à l’ensemble du ton adopté tout au long du livre. Une fin discrète mais juste, qui ne cherche pas à en faire trop.
Note finale : 4 étoiles sur 5.
Pourquoi ?
Tribulations d’un écrivaillon est une oeuvre singulière, portée par une plume honnête, un ton maîtrisé et une réflexion profonde sur la condition d’auteur méconnu. Hervé Garan parvient à transformer une expérience intime, presque invisible, en objet littéraire touchant et lucide. L’absence d’une intrigue classique ou de rebondissements spectaculaires est un choix assumé qui pourra séduire ou désarçonner, selon les attentes du lecteur.
Ce qui justifie les 4 étoiles :
+ Le style est soigné, à la fois accessible et intelligent.
+ Le regard porté sur l’écriture et l’édition est d’une rare sincérité.
+ L’humour discret et la dérision bien dosée apportent une vraie personnalité au texte.
– Le rythme volontairement uniforme et le fil narratif diffus peuvent limiter l’adhésion d’un lectorat plus attaché à la narration classique ou aux intrigues fortes.
En résumé, c’est un ouvrage précieux pour qui s’intéresse aux coulisses de la création littéraire, mais peut-être plus exigeant qu’il n’y paraît. Il mérite d’être lu pour ce qu’il ose dire avec humilité.